Conférence de presse de « Le retour de Mary Poppins ».

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Le 10 novembre 2018, nous avons pu assister à Paris à la conférence de presse du film Le retour de Mary Poppins en présence d’Emily Blunt (Mary Poppins), Lin-Manuel Miranda (Jack), Rob Marshall (le réalisateur) et John DeLuca (le producteur).

Voici en vidéo (en anglais) cet échange qui a eu lieu.


Version transcrite et traduite.

Animatrice : Rob Marshall, Emily Blunt, Lin-Manuel Miranda et John Deluca. Bienvenue à vous tous. Merci d’être là avec nous à Paris.

Rob Marshall : Merci beaucoup.

Animatrice : Juste une première question, quelle a été la chose la plus excitante, le plus gros challenge, la chose la plus effrayante pour faire une bonne suite au film iconique qu’est Mary Poppins ?

John : Tout, chaque étape tout du long.

Rob : C’était certainement intimidant. Je veux dire, j’ai senti que si quelqu’un devait travailler dessus, c’était forcément à moi de le faire car j’ai tellement aimé le premier film. On l’a tous aimé. [bruits dans la salle] Quelqu’un est-il en train de jouer ?

Voix : C’est un traducteur. Est ce que vous pouvez juste baisser le son svp ?

Rob : Oh je pensais que quelqu’un était en train de jouer.

Voix : C’est juste pour la traduction.

Rob : Ok. Ça ressemblait à un replay des Yankees. Je veux le score ! [rires]

Bref, ce film était très important pour moi et pour tellement de personnes, particulièrement tout celles impliquées dans ce film. Je savais quel était mon but pendant tout le temps où j’ai travaillé sur ce film, et je vais vous parler pour moi même : assurer la continuité du premier magnifique film de Bill Walsh et conserver cet esprit dans cette nouvelle histoire et ce nouveau film, celui d’un film musical. Mais il s’agissait toujours d’un deuxième film. Ça venait vraiment du cœur, pour chacun d’entre nous. La barre est très haute mais nous avons atteint ce but tous ensemble, car nous ressentons la même chose : nous avons de grands sentiments pour ce film, il a une place spécial dans notre coeur, pour nous tous.

Animatrice : Une autre question peut être ?

Question : Question pour Emily Blunt, il y a quelques chansons de jazz et de swing, est ce particulier pour vous de chanter sur du jazz ?

Emily : Oui c’est très excitant de chanter dans ce film. Je veux dire, les compositeurs Marc Shaiman et Scott Wittman ont voulu rendre hommage au film original en étant protecteur de l’idée originale tout en gardant à l’esprit que c’est une nouvelle époque, une nouvelle période, un nouveau chapitre. Comment utiliser l’idée originale ? Musicalement ils ont ouvert un grand espace. C’était terriblement excitant pour nous de performer dans de grands shows musicaux aux images palpitantes, de danser avec un orchestre. C’était passionnant. Donc oui j’ai adoré chanter.

Question : Et il me semble que les chansons ont été développées en fonction de vos personnages, est ce correct ?

Emily : Les chansons sont comme les limites d’un costume pour se mettre dans la peau de nos personnages. Parfois certaines chansons ont plusieurs versions avant d’en choisir une. Ma première chanson a eu trois ou quatre versions afin de pouvoir choisir, une des chansons de Lin a eu jusqu’à sept versions. C’est vraiment dans l’attente de trouver quelque chose qui soit parfait pour tous ceux qui écrivent, interprètent et composent.

Lin-Manuel : Et c’est excitant de travailler sur la musique originale car c’est un film musical qui est une espèce en voie de disparition. Et cela nécessite un processus de développement. Nous avons travaillé sur le script depuis le début jusqu’à la capture, sur beaucoup de versions et pas seulement pour nous et notre performance, mais pour avoir le meilleur moment.

John : Et nous voulions savoir qui allait jouer quel personnage, pas seulement pour les chansons mais pour le script aussi, pour créer un résultat excitant pour les acteurs.

Rob : Ca ne pouvait pas en être autrement, je pense que nous étions littéralement à la création de ces numéros en partant de zéro. Sans Emily et Rob présents depuis le tout début, je ne sais pas si nous aurions été autant inspirés. C’est un projet qui a commencé il y a trois ans, depuis 2015, et ils étaient à bord depuis presque le tout début.

John : Nous avions un atelier d’écrivain et ils en faisaient tous les deux partie afin de vraiment plonger dans les personnages et dans le script. Puis nous avons eu deux mois de répétition, qui ne sont jamais assez, mais cruciaux afin de restaurer les idées. Et c’est ainsi que nous nous sommes tous liés et que nous sommes devenus une famille. Je pense que vous pouvez le sentir, ces liens très profonds.

Question: Vous vous êtes préparée à devenir Mary Poppins, qu’est-ce que vous garderez d’elle ?

Emily : J’ai toujours son parapluie. Je pourrai dire que je l’ai même volé mais ça mettrait sûrement Alex des accessoires hors de lui, mais j’adore ce trésor. Comment je me suis préparée pour ça ? J’ai d’abord trouvé que nous aurions un script de David Magee exquis à travailler, quelque chose de magique, complexe et excitant à travailler comme acteur. J’ai été complètement ravie de jouer son rôle qui est si riche et plein de contradictions. C’est quelqu’un qui a le sens pratique et pourtant fantastique, elle est comme une super héroïne avec une grande humanité, elle est vraiment drôle et pleine de folie mais sévère, et donc c’était très excitant pour une actrice. J’ai trouvé l’excentricité que Rob et moi voulions pour capturer le personnage qui était très présent dans les livres, au nombre de nomre. C’était donc une combinaison de script parfait et des livres.

Question : Une question pour Lin-Manuel, c’était votre première expérience en film après avoir fait plein de choses cool sur scène, comment c’était pour vous de travailler avec Rob ?

Lin-Manuel : Et bien c’était comme être sur scène sauf que vous attendez un an et demi avant que les gens applaudissent votre travail. C’était la plus grosse différence pour moi parce que je viens du théâtre. Rob et John viennent du théâtre aussi et nous n’aurions pas pu avoir mieux que ces deux mois de préparation où nous sommes devenus une troupe. De plus, nous étions sur la construction d’une nouvelle comédie musicale et ce fut une joie d’en faire partie en tant qu’acteur.

Question : Rob, dans le ballet des allumeurs de réverbères sont présents non seulement des danseurs mais aussi d’authentiques gymnastes, était-ce le critère pour y participer et comment les avez-vous entraîné ?

Rob : C’est les conséquences d’un rêve pour John et moi. J’ai toujours voulu un numéro comme celui-ci, un numéro de huit minutes très athlétiques avec des hommes, et bien sur Mary et les enfants, mais un univers très masculin, viril et athlétique. Je recherchais surtout le caractère, et John et moi sommes très semblable là dessus. J’adore le break dance, mais il n’y avait pas de personnages pour ça. C’était donc très important pour moi de trouver des personnages qui avait leur propre personnalité et sensibilité, leur propre petit truc spécial, dirigé pas Lin-Manuel aussi qui a tout ça et plus. J’adore travailler avec des acteurs qui sont danseurs et chanteurs, c’est quelque chose de très important pour moi, parce que je pense au regard extérieur et aux personnages qui prennent vie. Donc en vérité, et je me fiche de savoir si vous jouez, vous dansez ou vous chantez. Et je pense que ce que vous ressentez quand vous regardez ce groupe éclectique d’hommes, vous vous fichez qu’ils soient grands ou petits, c’est une vue d’ensemble.

John : Quand nous avons embauché, nous avions demandé des capacités gymnastiques, c’est ce qui nous intéressait. Et puis nous avons fait des auditions des gens à vélo, et de ceux qui font des tours, et nous voulions payer pour ça car il s’agit d’un groupe dans un parc et nous voulions utiliser tout ce qui était à notre portée.

Rob : Ces gars n’ont jamais fait de numéros musicaux avant.

Emily et Rob : C’était vraiment très drôle, vous essayez d’enseigner aux meilleurs athlètes de BMX à compter sur des temps, à compter « 3,2,1… » alors qu’ils n’avaient jamais fait ça avant. Heureusement il y avait les danseurs. Mais c’était fantastique, ils apprennent vite.

Question : Comment avez-vous réussi à donner une nouvelle vie à ce classique Disney pour la nouvelle génération tout en gardant de la nostalgie pour l’ancienne génération ?

Animatrice : C’est vrai que c’est important, car vous faites des allusions au premier opus musicalement et de tout ce que l’on voit. À quel point était-ce important pour vous Rob ?

Rob : Nous voulions respecter le premier film qui était parfait mais en même temps nous voulions vraiment créer une nouvelle histoire, et vous savez il s’agissait vraiment de trouver notre histoire dans les livres ou les aventures épisodiques. Donc nous voulions utiliser les scènes musicales ou des morceaux de personnages pour créer notre histoire, c’était notre façon de faire à David, John et moi-même. Et comme Emily a parlé de commencer par les livres, nous l’avons fait aussi, car les livres se déroulent durant la Grande Dépression à Londres, et c’était la clé pour nous, comme si nous pouvions tous comprendre de la lutte et la noirceur de cette période. Ça a toujours été comme une balance constante, ça aurait été vraiment bizarre de ne pas atteindre ce but de créer quelque chose de nouveau et vraiment spécifique pour un bel hommage, et c’est pourquoi nous avons passé autant de temps à créer quelque chose de musical.

Animatrice : John, vous voulez rajouter quelque chose ?

John : Je pourrais. Je pense que dans tout ça, c’est comme une boule à neige où tout le monde danse sur de la musique. Rob était très exigeant de ce qui était autorisé ou non, car je pense que ces clins d’œil rendent l’audience plus fun. En effet, on ne les voit pas dès la première fois et on a alors envie de revoir le film plusieurs fois. Mais l’autre chose importante est l’état actuel du monde qui est de plus en plus sombre, nous voulions juste une sorte d’antidote au stress du monde et des sentiments de nos jours. Les gens sont tellement habitués à la violence et au cynisme que nous avons pensé à une ouverture dans les nuages à travers lesquels Mary arriverait et donnerait la petite lumière. Et c’est pour cela également que nous pensions que c’était le moment parfait pour faire ce film. Mais une autre raison pour laquelle c’était le bon moment, ce sont ces trois personnes [en désignant Emily Blunt, Lin-Manuel Miranda et Rob Marshall]. Nous avons Emily, et personne d’autre n’aurait pu incarner Mary Poppins, il n’y avait qu’une seule personne pour ce rôle et c’est Emily Blunt. Nous avons Lin-Manuel, et être capable d’avoir ces deux esprits brillants est une chance. Puis nous avons Rob Marshall, c’est un génie, avoir autant d’inspiration pour ce film. J’étais là chaque jour et j’ai vu toutes les facettes de lui. Il est plein de création et prend grand soin de voir chaque détail sans perdre de vue l’ensemble, et je pense que c’est un vrai artiste que d’être capable de faire ça.

Lin-Manuel : Oui, si vous étiez né plus tôt au XXe siècle, nous aurions parlé avec Vincent Minelli et Stanley Donen et les décideurs de ces grandes comédies musicales mises en place pour prendre la mesure d’être sur le bon chemin pour une comédie musicale originale.

Question : Vous évoquiez les dimensions politiques du film, déjà présentes dans le premier avec les suffragettes, là il y a une évocation du côté sombre des banques. Est-ce que c’est ce que vous avez voulu laisser entendre dans le film?

Rob : Nous sommes durant la Grande Dépression à Londres. Le fait est que vous pouvez perdre votre maison. A mon avis c’est plus un message personnel sur la perte et comment vous faites avec ça en rapport avec les regrets d’adulte. Michael et Jane doivent faire face à de vrais problèmes de la vie et ils ont perdu la magie et l’imagination que les enfants ont et qui disparaît. Particulièrement pour cette famille, ils doivent affronter la perte d’un être cher, et comment faire avec ? Je veux dire comment affronter les temps sombres, on est en temps de Grande Dépression, comment trouver la lumière ? Et le moyen de trouver la lumière est le retour de Mary Poppins qui vient les aider de la meilleure façon : elle les pousse à se découvrir eux même. Et c’est la chose extraordinaire à propos du personnage, elle les laisse trouver par leur propre moyen et d’une très belle manière, puis s’en va. Et je pense honnêtement que c’est le message principal du film. Comment arrive-t-on à se lever le matin ? Comment fait-on face à une perte ? Si vous pouvez trouver la lumière, une lueur d’espoir par n’importe quel moyen, c’est comme ça que vous avancez. Et c’est aussi le sujet de tous les livres de P.L. Travers : cette merveilleuse idée que si nous regardons à travers des yeux d’enfant et avec leur sensibilité, alors nous trouverons la force d’avancer.

Question : Emily, tout le monde vous voyait déjà dans le rôle de Mary Poppins même la presse. Mais vous, vous êtes-vous déjà vu dans ce rôle ? Qu’avez-vous pensé quand Rob vous a demandé si vous vouliez être Mary Poppins ?

Emily : Je me suis dit qu’il fallait que je sois à la hauteur de la réputation, vous savez elle est tellement emblématique, Julie Andrews était très emblématique. Vous savez vous sentez cette sorte de responsabilité. Je savais que j’allais le faire, c’est un oui évident pour moi, et en partie pour Rob que je connaissais d’avant et avec qui j’avais travaillé. Autant d’élégance, de profondeur et de cœur, je sentais la responsabilité de faire une Mary Poppins version 2018. Personne ne voulait revoir la première version de Mary Poppins car c’est une version trop ancrée dans la tête des gens, vous pensez à votre enfance quand vous pensez à Mary Poppins. Et avec un personnage comme celui ci, tout vient très vite et vous surpassez votre peur.

Question : Il y a 50 ans Julie Andreas et Dick Van Dyke sont devenus des icônes Disney mais aussi pour toute une génération, est ce que vous pensez ou appréhendez le fait de devenir également des icônes pour la nouvelle génération, voire des icônes du cinéma ?

Lin-Manuel : Je suis trop flippé à l’idée de devenir une poupée Barbie. Quand c’est devenu réel, ils m’ont montré une poupée de Jack l’allumeur de réverbères.

Emily : En poupée ?

Lin-Manuel : Oui, en version Barbie. Et c’était vraiment au-delà du réel. Je pense que ce qui m’a préparé pour ça c’est d’emmener mon fils sur le tournage tous les jours, je l’emmenais à chaque fois qu’il y avait un numéro musical. Et je savais que ce que nous filmions était fantastique, mais à la fin de chaque prise, je pouvais voir les yeux d’enfant briller et s’agrandir pour devenir aussi gros que des assiettes. C’était un petit aperçu des réactions qu’allait provoquer ce film, à travers les yeux de mon fils en tout premier qui pensait que son père était vraiment cool. Donc c’est plutôt un bon héritage, si c’est un héritage.

Emily : je pense que le mot « iconique » est trop écrasant. Je l’ai vu pour la première fois spécialement avec des enfants, ce qui m’a permis de voir les effets émouvants de ce film. Et vous savez je pense qu’elle est un personnage qui peut transporter incroyablement les gens. Elle est un peu comme si elle était ma super héroïne, donc je suppose que j’arriverai à faire d’elle un personnage Marvel. Vous savez ma fille, vu qu’on parlait d’enfants, m’a dit il y a quelques jours « fais ta voix de Mary Poppins » et je l’ai fait. C’était la première fois qu’elle réalisait. Bien sûr elle avait vu le film et elle comprend que je joue un rôle, mais je ressens la même chose, que je pourrais être un héros dans les yeux des enfants avant qu’ils ne deviennent adolescents et embarrassés. Donc de garder l’aspect iconique à travers leurs yeux.

Question : On parlait de Dick Van Dyke. J’aurais aimé en savoir plus sur sa participation à ce film.

Lin-Manuel : Dick Van Dyke a plus d’énergie à 92 ans que j’ai jamais eu de toute ma vie. C’est un café humain. Les deux jours où nous l’avions sur le tournage, si vous parlez avec tout le monde, la plupart vous diront que c’était magique car il est la connexion avec le premier film, il fait le lien. Il est magique, vous êtes plus heureux et vous vous sentez mieux parce qu’il est dans la même pièce que vous. Je sais qu’il peut avoir deux ovations : une simplement pour exister, et l’autre pour jouer son personnage.